Aux termes de l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme :

« L’extension limitée de l’urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d’eau intérieurs désignés au 1° de l’article L. 321-2 du code de l’environnement est justifiée et motivée dans le plan local d’urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l’accueil d’activités économiques exigeant la proximité immédiate de l’eau.

Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l’urbanisation est conforme aux dispositions d’un schéma de cohérence territoriale ou d’un schéma d’aménagement régional ou compatible avec celles d’un schéma de mise en valeur de la mer. (…) ».

L’application de ces dispositions impose donc nécessairement de déterminer si tel ou tel projet, envisagé dans un espace proche du rivage, est ou non constitutif d’une extension de l’urbanisation.

Il convient à ce titre de noter que, par un arrêt rendu le 7 février 2005, le Conseil d’Etat a indiqué qu’un projet étend l’urbanisation dans les espaces proches du rivage dès lors qu’il a pour effet soit d’élargir un périmètre bâti, soit d’en modifier de manière significative les caractéristiques (CE, 7 févr. 2005, Société Soleil d’or et cne de Menton, n° 264315 ; CE, 9 juin 2004, n° 262689, Cne Roquebrune-Cap-martin : JurisData n° 2004-067230).

L’appréciation qu’induit la mise en œuvre de ces critères ne se limite pas aux seuls terrains voisins du projet mais s’étend à l’examen de l’ensemble du quartier (CE, 12 mars 2007, Commune de Lancieux, n° 280326).

Le juge va ainsi rechercher si, à l’échelle du quartier, le projet de construction entraîne une modification des caractéristiques des lieux notamment par une sur densification du tissu urbain.

Dans un arrêt rendu le 3 juillet 2020, la cour administrative d’appel de NANTES a ainsi pu juger que :

« 5. En deuxième lieu, aux termes de l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme :  » L’extension limitée de l’urbanisation des espaces proches du rivage (…) est justifiée et motivée dans le plan local d’urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l’accueil d’activités économiques exigeant la proximité immédiate de l’eau. Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l’urbanisation est conforme aux dispositions d’un schéma de cohérence territoriale (…) « . Doivent être regardées comme une extension de l’urbanisation au sens de ces dispositions l’ouverture à la construction de zones non urbanisées ainsi que la densification significative de zones déjà urbanisées. La seule réalisation dans un quartier urbain d’un ou plusieurs bâtiments qui est une simple opération de construction ne peut être regardée comme constituant une extension de l’urbanisation au sens de la loi. Il résulte en outre de ces dispositions qu’une opération conduisant à étendre l’urbanisation d’un espace proche du rivage ne peut être légalement autorisée que si elle est, d’une part, de caractère limité, et, d’autre part, justifiée et motivée dans le plan local d’urbanisme selon les critères qu’elles énumèrent. Cependant, lorsqu’un schéma de cohérence territoriale mentionné par les dispositions de l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme comporte des dispositions suffisamment précises et compatibles avec ces dispositions législatives qui précisent les conditions de l’extension de l’urbanisation dans l’espace proche du rivage dans lequel l’opération est envisagée, le caractère limité de l’urbanisation qui résulte de cette opération s’apprécie en tenant compte de ces dispositions du schéma concerné.

6. Il ressort des pièces du dossier que le projet en cause, qui fait partie d’une opération plus large ayant donné lieu à un permis d’aménager devenu définitif le 9 février 2018, est situé dans une zone où l’habitat est très majoritairement pavillonnaire, alors que le projet, qui prévoit la création, sur un terrain, qui n’était initialement pas bâti, d’une surface de plancher de 4 346 m2, sur un terrain de 9 742 m2, comporte un premier bâtiment concernant un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) de 58 chambres, en R+2 et un second bâtiment concernant une résidence pour séniors de 15 logements, en R+1. Toutefois, il ressort du document intitulé  » carte zonage habitat  » et de la carte figurant dans le dossier de demande de permis de construire dans la notice, sous la rubrique  » contexte urbain et paysager du site  » que le projet est inclus dans un quartier où sont également situés, au nord, à l’ouest et au sud, trois immeubles de logements collectifs aux dimensions comparables. Ainsi, eu égard aux caractéristiques du quartier urbain dans lequel il s’implante, le projet n’entraîne pas une densification significative de la zone. Dès lors, la seule réalisation du projet dans ce quartier urbain est une simple opération de construction qui ne constitue pas une extension de l’urbanisation au sens de l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme lequel n’a, par conséquent, pas été méconnu. » (CAA Nantes, 3 juillet 2020, SCI Les Près Biard, n° 19NT03319, confirmé par CE 13 déc. 2021 n° 443815).

Plus généralement, le juge administratif considère que ne constituent pas une extension de l’urbanisation :

  • La réalisation, sur quatre parcelles réunies, d’une superficie totale inférieure à 4 000 m2 située dans la partie urbanisée de la commune, d’un immeuble collectif de 3 à 5 étages, comportant 41 logements, construit par décrochages successifs à l’arrière d’une villa de caractère réhabilitée et entouré de deux immeubles de 7 étages (CE, 7 févr. 2005, Sté Soleil d’Or) ;
  • La construction de trois immeubles de 8, 7 et 2 étages regroupant 76 appartements et créant une SHON de 6 208 m2, dès lors que le terrain d’assiette du projet, situé au cœur de l’agglomération, est entouré par des immeubles de 7 et 10 étages (CAA Nantes, 29 nov. 2005, n° 04NT01210, D’Humière c/ Cne La Baule) ;
  • La construction de 4 bâtiments collectifs d’une hauteur limitée à 2 niveaux, dès lors qu’ils respectent la densité et la volumétrie d’un quartier pavillonnaire (CAA Nantes, 9 janv. 2017, n° 15NT01787, Assoc. Le clos de la Mare) ;

En application de ce qui précède, la circulaire du 14 mars 2006, aujourd’hui abrogée, indiquait qu’« En règle générale, le fait d’édifier une ou plusieurs constructions à l’intérieur d’une ville, d’un village ou d’un hameau ne constitue pas une extension d’urbanisation. Cela correspond à l’évolution normale d’une ville ou d’une commune rurale » (Circ. 14 mars 2006). 

La cour administrative d’appel de Bordeaux a pu retenir une analyse identique en jugeant que la réalisation de six constructions qui s’insèrent dans le bâti environnant et qui n’augmentent pas sensiblement la densification des constructions n’est pas une extension de l’urbanisation au sens de l’article L. 121-8 (CAA Bordeaux, 25 juin 2015, n° 13BX02223).

Enfin, dans un arrêt rendu le 3 avril 2015 (CAA Marseille, 3 avr. 2015, Assoc. défense Bormes et Lavandou, n° 13MA01607), la cour administrative d’appel de MARSEILLE a considéré que ne constitue pas une extension de l’urbanisation le projet visant les parcelles représentées sur le plan suivant, et portant sur la réalisation d’un programme de 4 bâtiments de deux niveaux, avec création de 20 logements et aménagement d’emplacements de stationnement et de garages attenants :

Si l’appréciation portée conduit à considérer le projet comme constitutif d’une extension de l’urbanisation, celui-ci ne pourra être autorisé que si l’extension en cause présente un caractère limité et s’avère, de surcroit, justifiée et motivée par le plan local d’urbanisme (ou, le cas échéant, si l’urbanisation est conforme aux dispositions d’un schéma de cohérence territoriale).