Par principe, une association ne peut contester la légalité d’un acte administratif que s’il porte atteinte aux intérêts dont celle-ci a la charge (CE 28 décembre 1906, Syndicat des patrons coiffeurs de Limoges, Rec 977).

En matière d’autorisation d’urbanisme comme en toute autre matière, l’intérêt à agir d’une association s’apprécie ainsi au regard des principes de spécialité (CE, 28 déc. 1906, n° 25521, Syndicat des patrons coiffeurs de Limoges) et de proximité (CE, 31 oct. _çç1990, n°95083, Union régionale pour la défense de l’environnement, de la nature, de la vie et de la qualité de la vie en Franche-Comté c/ Ville de Raddon-et-Chapendu : JurisData n° 1990-645351).

Autrement dit, une association n’est recevable à attaquer une décision que pour autant que celle-ci porte une atteinte directe aux intérêts collectifs qu’elle a pour mission de défendre, ce qui suppose une adéquation entre l’objet social de l’association et la décision en cause, ce qui implique :

  • D’une part, qu’il existe un lien suffisamment direct et étroit entre les intérêts défendus par l’association et la décision qu’elle entend contester,
  • D’autre part, que le périmètre d’action de l’association est en lien avec l’acte attaqué.

De ce point de vue, une association locale qui a notamment pour objet de « promouvoir et défendre le cadre de vie » d’un quartier spécifique d’une commune dispose d’un intérêt lui donnant qualité pour contester le permis de construire d’une construction située dans ce quartier (CAA Paris, 12 nov. 1999, n°s 99PA00065 et 99PA00066, Ville de Paris c/ Assoc. du quartier Mouffetard).

De même qu’une association qui s’est donnée pour but, par ses statuts, de contribuer au développement harmonieux de l’habitat dans le respect des sites et paysages sur le seul territoire d’une commune justifie d’un intérêt lui donnant qualité pour contester un permis de construire alors même que ce permis (CAA Lyon, 11 mars 1997, n°96LY00528, Cne de Saint Gervais c/ Assoc. des amis de Saint Gervais).

En sens contraire, il est admis qu’eu égard à la généralité de son objet social portant à la fois sur la défense de l’environnement et la protection des intérêts des consommateurs et des contribuables, une association ne justifie pas d’un intérêt lui donnant qualité pour demander l’annulation d’une délibération municipale (CAA Lyon, 1re ch., 7 août 2008, n° 06LY01602).

De même, une association de défense de l’environnement ne justifie pas d’un intérêt lui donnant qualité pour agir contre un permis de construire, dès lors que son action s’étend à l’ensemble d’une région alors que le projet contesté est limité et situé dans une zone ne présentant pas d’intérêt écologique majeur (TA Strasbourg, 10 mai 2007, n° 0702048).

Par un arrêt rendu le 29 janvier 2003 (n° 199692), le Conseil d’Etat a quant à lui jugé :

« Considérant qu’aux termes de l’article 3 de ses statuts, l’association requérante a pour objet « la représentation et la défense, dans tous les domaines, des intérêts des propriétaires, dans le cadre de l’intérêt général et notamment : / de réunir ses adhérents pour promouvoir et faciliter de bonnes relations et créer des liens de solidarité, / d’informer les adhérents des projets et du devenir des Arcs, / d’assurer leur représentativité auprès du public, des administrations, de la commune, de toutes parties intervenant aux Arcs et, si besoin est, leur défense en justice, / d’étudier toutes les questions concernant les Arcs ou pouvant exercer une influence sur la station, / d’assurer la défense de la station et des propriétaires par tous moyens légaux, / de contribuer à la vie et à l’animation des Arcs et à la promotion du site » ; qu’en estimant qu’un objet social aussi général, qui ne vise pas précisément les questions d’urbanisme ni même la défense du site, ne conférait pas à l’union des propriétaires pour la défense des arcs un intérêt de nature à lui donner qualité pour demander l’annulation du permis de construire litigieux, la cour administrative d’appel, par un arrêt qui est suffisamment motivé et qui n’est pas entaché de dénaturation des pièces du dossier, a fait une exacte application des règles relatives à l’intérêt pour agir ».

Par conséquent et ainsi que l’a jugé la cour administrative d’appel de NANCY, un objet social trop général ou sans rapport avec les considérations d’urbanisme ou d’utilisation des sols n’est pas de nature à permettre de justifier d’un intérêt à agir à l’encontre d’une autorisation d’urbanisme :

« 8. Selon l’article 3 des statuts de l’association Forum d’Alsace à la date d’affichage de la demande de permis de construire modificatif :  » L’association a pour but : /- Développer des actions à caractère humanitaire, social, écologique, culturel, pédagogique, identitaire. Ces actions auront un caractère d’intérêt général et seront ouvertes en direction des habitants de l’Alsace et plus généralement du Bassin Rhénan. / Elles pourront également se faire en partenariat avec d’autres peuples et cultures du monde entier. / – Relayer et aider d’autres associations ayant les mêmes buts que ceux précisés ci-dessus. / – Mettre en valeur le patrimoine alsacien, notamment par des actions de sensibilisation, culturelles, linguistiques, et par l’organisation d’événements. / – L’association pourra intervenir en tous lieux, et dans le respect des dispositions légales et réglementaires s’appliquant à ses objectifs et ses moyens « .

9. L’objet social ainsi défini est sans rapport direct avec les préoccupations d’urbanisme et son champ d’action géographique, expressément étendu aux habitants de l’Alsace et plus généralement du Bassin Rhénan, excède largement la portée du projet faisant l’objet de l’autorisation litigieuse.

10. Dès lors, l’objet social de l’association ne lui confère pas un intérêt lui donnant qualité pour demander l’annulation de cette autorisation.
» (CAA NANCY, 20 juil. 2017, n° 16NC02008).

Il en résulte qu’une association au champ d’action statutaire trop large et trop général ne pourra se voir reconnaître un intérêt suffisamment direct lui donnant qualité à agir contre une autorisation d’urbanisme (CAA LYON, 19 déc. 2017, n° 17LY03190).