L’occupation des sols sur le territoire des communes dépourvues de documents de planification urbaine – à savoir dépourvues de plan local d’urbanisme, de document d’urbanisme en tenant lieu ou de carte communale – est strictement régie par les dispositions du code de l’urbanisme, lequel fixe la règle dite de constructibilité limitée.
Cette règle consiste à interdire l’édification de toute construction n’étant pas située dans les parties actuellement urbanisées de la commune, à l’extérieur desquelles ne pourront être réalisés (en application de l’article L. 111-4 du code de l’urbanisme) que :
- Les travaux consistant en l’adaptation, l’extension, la réhabilitation ou le changement de destination d’une construction existante,
- Les constructions nécessaires à l’exploitation agricole (sous certaines conditions),
- Les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées,
- Les constructions présentant un intérêt communal.
Dans tous les autres cas, le projet de construction devra être conforme à l’article L. 111-3 du code de l’urbanisme, qui prévoit qu’ « En l’absence de plan local d’urbanisme, de tout document d’urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune », sans toutefois définir la notion de « parties urbanisées de la commune ».
C’est donc au juge qu’est revenue la tâche de dessiner les contours de cette notion en veillant à respecter la portée des dispositions précitées, dont l’objet est de lutter contre le mitage tout en préservant des espaces agricoles ou forestiers
Une décision Mme Cadel (CE 30 oct. 1987, n° 81236) a posé comme critères principaux la densité en constructions de la zone considérée et l’existence de voies d’accès et d’équipements.
Pour autant, la prise en compte de ces éléments ne dispense pas l’autorité chargée de délivrer les autorisations d’occupation du sol de se livrer à une analyse supplémentaire, tenant compte de plusieurs autres éléments.
Au fil des décisions rendues, le juge a ainsi fixé tout un ensemble de critères tenant lieu de véritable faisceau d’indices auquel devra se référer l’autorité compétente.
L’examen des caractéristiques de chaque terrain terrain doit ainsi permettre à cette dernière de déterminer le caractère urbanisé ou non d’un secteur en appréciant :
- La distance par rapport au bourg ou au hameau,
- Le type d’habitat (groupé, urbanisation dispersée ou linéaire), le nombre de constructions et l’existence de terrains voisins déjà construits,
- La taille du parcellaire,
- La desserte par les équipements,
- L’insertion dans le paysage,
- La protection des exploitations agricoles,
- Les précédents créés par la délivrance de permis de construire ou de certificats d’urbanisme positifs pour les terrains considérés, au moment de cette délivrance, comme compris dans la partie actuellement urbanisée de la commune.
En pratique, le critère du nombre de constructions est fréquemment employé, notamment associé à celui de la distance par rapport au bourg ou au hameau (lequel se caractérise par l’existence de plusieurs bâtiments suffisamment proches les uns des autres pour être regardés comme groupés).
Ce faisceau d’indices a notamment permis de regarder comme étant intégrés à une partie actuellement urbanisée de la commune :
- Un terrain situé à proximité immédiate d’un lotissement (distant de 300m), lequel est composé d’un nombre suffisant d’habitations desservies par des voies d’accès (CAA Nancy, 24 mars 1994, n° 92NC00873) ;
- Un terrain entouré de constructions de tous les côtés, sauf à l’est (TA Nancy, 20 nov. 1986), ou une propriété voisine sur trois côtés de parcelles déjà construites et jouxtant aussi un terrain à l’état champêtre (CE, 8 oct. 1993, n° 101681) ;
- Un terrain desservi par l’ensemble des réseaux publics et situé à moins de 200m d’une dizaine de maisons (CE, 21 juin 1989), ou à proximité immédiate de plusieurs parcelles supportant des constructions (CE, 10 juin 1992, n° 96537).
De même qu’un terrain situé « en bordure d’un secteur de constructions agglomérées […] se trouve par là même inclus dans les parties actuellement urbanisées de la commune »(CE 11 juil. 1988 Ministre de l’équipement c/ M. Bricaud n° 85210).
A l’inverse, ont succombé à l’analyse du juge les autorisations délivrées :
- Dans un site boisé peu construit et peu équipé (CE, 7 oct. 1988, n° 69957) ;
- Au sein d’un secteur ne comportant que quelques constructions dispersées voisines d’espaces naturels (CAA Nantes, 2e ch., 18 oct. 2000, n° 99NT01208) ;
- Sur un terrain situé à 1,4 km de l’agglomération, relativement éloigné des quelques habitations les plus proches, dans un secteur à vocation agricole et entouré de bois et de vignes (CE, 27 oct. 1989, n° 83590).
Quoi qu’il en soit, toute décision refusant l’octroi d’une autorisation d’urbanisme au motif que le terrain d’assiette se situe en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune peut faire l’objet d’un recours contentieux devant le tribunal administratif, ou d’un recours gracieux devant l’autorité compétente, dans un délai de deux mois à compter de sa notification.